Une émission à écouter en confinement, dédiée à celles et ceux qui n’ont pas de petit coin de jardin. Grâce à nos associations partenaires et aux richesses de la nature, respirez, vous êtes sur la bonne fréquence 🙂 .
« Le lichen prospère de la région des nuages aux grèves éclaboussées d’embruns. Il escalade les cimes ou nul autre végétal n’a de prise. Le désert ne le décourage pas ; le glacier ne saurait l’expulser ; pas plus que les tropiques ou le cercle polaire. Il défie l’obscurité de la caverne et se risque dans le cratère du volcan. Il ne craint que le voisinage de l’homme.
En raison de sa misanthropie, la ville est la seule barrière qui l’arrête. Si malgré tout il la franchit, c’est pour aller prendre l’air en haut des clochers, à moins de perdre avec la santé sa particulière physionomie.
Stérile et maussade, le lichen urbain suffoque. La respiration humaine le pollue. A Rome pour trouver un lichen reconnaissable, il faut grimper sur la coupole de Saint-Pierre. »
« Le lichen est le plus multiforme des végétaux. Koerber se fit des illusions lorsqu’il prétendit les enrégimenter sous les dénominations de croûteux, de feuillus et d’arborescents. Combien de significations ces adjectifs ne sont ils pas obligés d’accueillir pour embrasser tant bien que mal le polymorphisme des lichens !
Quantité d’entre eux forment des toits de tuiles imbriquées ; voire des pavements : dalles triangulaires, pentagonales, polygonales. D’autres simulent des Voies lactées, des systèmes stellaires. D’autres encore, suspendus aux branches, évoquent des barbes, des crinières d’équidés ou des chevelures absaloniennes.
Une entière tribu, les Graphidées, tapisse d’écritures indéchiffrables les supports qu’elle choisit : caractères minuscules ou majuscules, incrustés ou en relief : linéaires, fourchus, chinois, cunéiformes.
D’autres, les Calicées, à peine visibles à l’œil nu, révèlent sous la loupe des paysages foudroyés, apocalyptiques ; où des cobras se dressent et fument comme des tripodes par l’entonnoir qui leur sert de tête.
Le lichen imite toutes sortes d’objets et produits manufacturés: encaustiques, marqueteries, mosaïques; feutres et bysses ; boucles et ardillons, coupes, massues, casques, pavois, clous ; allumettes ; rubans, filets, éventails ; cuirs imprimés ; velours et dentelles au fuseau.
On dirait qu’il se compose, en totalité ou en partie, de substances les plus disparates ; amidon et farine ; laine et pourpre ; or, soufre et cire à cacheter ; éponge, liège et anthracite ; parchemin et gutta-percha.
Il y a le lichen ruche ; le lichen labyrinthe ou madrépore ; le lichen banc d’huîtres ou banc de corail. Des lichens en forme de fougères, en forme de poulpes aux innombrables ventouses. Certains ont tout l’air d’une sphère, d’un trapèze, d’un mûron, d’une espingole de brigand.
L’Encepbalograpba cerebrina, son nom l’indique, ressemble à un petit cerveau. »