« Fleuve profond, sombre rivière », recueil de « Negro Spirituals » traduits et adaptés par Marguerite Yourcenar est à n’en pas douter un livre étrange, inclassable et à certains égards dérangeant. Pourrait-il, par exemple, sortir aujourd’hui ? Même signé de la main de la première femme à entrer à l’Académie française – pas si sûr.
C’est que depuis sa première parution dans les années 60 et sa sortie révisée en 74 dans la collection de poche poésie/Gallimard, les temps ont changé. L’Universalité défendue par Marguerite Yourcenar est de plus en plus souvent attaqué, parfois à juste titre. Mais peut être suis-je moi même un peu trop prudent, car vérification faite, le livre est toujours disponible chez Gallimard sous une nouvelle couverture qui plus est.
Cependant, puisque j’ai commencé, je présenterai les quelques éléments qui pourrait porter préjudice à ce que l’on appelle aujourd’hui l’appropriation culturelle. Une petite explication s’impose. Selon Wikipedia, « depuis les années 2000, l’appropriation culturelle se réfère à l’idée que l’utilisation d’éléments d’une culture par les membres d’une culture « dominante » ou jugée néocoloniale serait intrinsèquement irrespectueuse ». Fin de citation.
L’adverbe « intrinsèquement » coupant l’herbe sous le pied à tous débats, je ne m’aventurerais pas à commenter cette définition. D’ailleurs le but de cette brève introduction n’est pas de polémiquer mais de replacer le livre de Marguerite Yourcenar dans son contexte. Ainsi premièrement au niveau de vocabulaire que je n’ai pas jugé bon de changer et l’utilisation de « nègre » pour noir. Deuxièmement sur le contenu et la certaine hauteur à partir de laquelle Marguerite Yourcenar analyse son sujet. Hauteur qui est selon moi aux antipodes de la condescendance mais au contraire une recherche de l’universel, dénominateur commun à l’ensemble de l’humanité.
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